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Les messicoles : tout un programme !

Une flore diversifiée
Un héritage à recevoir

Des plantes toxiques : de l’ivraie enivrante à la nielle des blés
Elle est royale la nielle des blés !


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Une flore diversifiée

Dans certaines régions (Causses, Cerdagne, Luberon), plus de 150 espèces adventices des cultures et messicoles se rencontrent encore aujourd'hui dans les champs de céréales d'hiver. Un seul champ peut héberger plusieurs dizaines d’adventices différentes, certains en contiennent plus d’une soixantaine.

Adonis annuel (Adonis annua L.),
adonis couleur de feu (Adonis flammea Jacq.),
nielle des blés (Agrostemma githago L.),
turgenie (Turgenia latifolia (L.) Hoffm.),
neslie à panicule (Neslia paniculata (L.) Desv.),
aspérule des champs (Asperula arvensis L.),
cératocéphale en faux (Ceratocephalus falcatus (L.) Pers.),
mâche à fruits en hérisson (Valerianella echinata (L.) DC),
coquelicot argemone (Papaver argemone L.) et
vélar d’Orient (Conringia orientalis (L.) Dumort) sont, entres autres, les espèces significatives des moissons non désherbées chimiquement.

Papaver argemone
et tabouret des champs (Thlaspi arvense)

Un héritage à recevoir

Les messicoles les plus anciennes, présentes depuis plus de quinze siècles, comme la nielle des blés, l’aspérule des champs, le gaillet à trois cornes (Galium tricornutum Dandy) ou le bleuet des champs (Centaurea cyanus L.) côtoient des espèces d’introduction plus récente (à partir du Moyen-âge) comme le conringie ou plus récemment encore le bifore radié (Bifora radians M. Bieb.).
Cette diversité floristique tisse un lien patrimonial entre les différentes étapes du développement agricole et humain et nous relie jusqu'aux sources de l’agriculture fondatrice de notre civilisation.

Adonis couleur de feu (Adonis flammea)

Agrostemma githago avec Oedemère noble

Coupe d'une capsule de Nielle





Ceratocephalus falcatus

Des symboles forts

            Les messicoles les plus courantes comme les bleuets et les coquelicots ont été les supports symboliques d’évènements et de commémorations. La fleur de bleuet a  été choisie pour représenter les nombreux soldats morts pendant la guerre de 1914-1918. Alors que les vétérans portaient encore les pantalons rouge garance, les premières plus jeunes recrues furent vêtues d’un uniforme bleu. Ils furent surnommés les bleuets. A la fin de la guerre, dans les champs ravagés par les bombardements, et dès le premier printemps 1919, les fleurs des champs comme les bleuets et les coquelicots fleurirent dans ces espaces de désolation. L’Angleterre a choisi les coquelicots, la Belgique les marguerittes et la France les bleuets comme symbole des morts tombés lors des combats. Suzanne Lenhardt, infirmière et Charlotte Malterre touchées par les souffrances des blessés de la Première Guerre mondiale décidèrent de les aider. Les fleurs de bleuet confectionnées en tissu étaient fabriquées par les mutilés soignés à l’hôpital, ce qui leur permettaient de gagner un peu d’argent. Ces bleuets commémoratifs, d’abord en tissus puis en papier et enfin autocollants, ont longtemps été distribués pour commémorer l’armistice du 11 novembre 1918.

Nous recherchons toujours ce petit objet commémoratif (cure dent en bois sur lequel est fiché une fleur de bleuet en papier). La photo ci-contre représentant "le bleuet de France" est un autocollant diffusé dans les années 1970.


Le Bleuet de France




Gaillet à trois cornes (Galium tricornutum)

Bifore radié (Bifora radians)

Gravure Bleuet et coquelicot (par Grandville)

Des plantes toxiques : de l’ivraie enivrante à la nielle des blés

            Vous avez dit mauvaise herbe ? Il y a aussi, en effet, des plantes toxiques chez les messicoles.
Que reste-t-il dans nos sociétés de la parabole biblique : « il faut séparer le bon grain de l’ivraie » ?
Cette phrase tirée des Evangiles et développée par Saint Matthieu « L’ivraie ce sont les fils du Malin ; l’ennemi qui l’a semée, c’est le Diable » représente outre l’interprétation théologique une orientation binaire sur le bon et le mauvais. Il y aurait donc des bonnes herbes et des mauvaises.

Une graminée associée aux céréales, l’ivraie enivrante (Lolium temulentum L.), a connu un passé riche et mouvementé. L’homme a connu les effets psychotropes de l’ivresse (d’où l’origine du mot ivresse ou enivrant) avec cette plante, avant celle procurée par le vin d’apparition plus tardive. Les propriétés psychotropes de l’ivraie sont bien connues délire, troubles visuels et « transports furieux ». Elles sont dues à l’alcaloïde nommé tumeline, en référence au nom botanique latin de l’espèce « tumelentum » (« qui est en état d’ivresse, imbibé »). Elle a été mélangée au cannabis, en Égypte, pour en doper les effets. Mais les symptômes de l’intoxication comportent aussi :
« des céphalées, des vertiges, le tremblement de la langue, de la gêne dans la prononciation, la déglutition et la respiration, de la somnolence, des douleurs, de l’angoisse précordiale, des vomissements, de la diarrhée ou inversement de la constipation, une sueur froide sur tout le corps et surtout un tremblement général, avec souvent des contractions spasmodiques, des convulsions douloureuses, la prostration avec parfois une raideur tétanique »
(P. Fournier).
Bosc, botaniste au siècle dernier signale :
« J’ai pu remarquer dans un de ces cantons (Haute Bourgogne) que l’habitude (de l’ivraie) leur rendait l’usage de ce pain moins dangereux, car les cultivateurs paraissaient bien portants, tandis qu’un seul déjeuner, pris chez l’un d’eux, me troubla la tête et m’affaiblit pendant plusieurs jours ».
L’histoire ne dit pas si ses inventaires floristiques furent affectés d’une soudaine fantaisie ou d’une absence de rigueur peu commune. L’autre nom de cette plante, souvent utilisé sans en connaître l’origine, est : la zizanie (du grec : «zizanion = « qui est d’origine sémite »). « Semer la zizanie » c’est jeter le trouble et la discorde au sens figuré. Bien que, semer l’ivraie dans le champ du voisin fut bien, au sens propre, semer la zizanie et chercher le bâton pour se faire battre.

Ressources bibliographiques :
-L'ivraie, l'ivresse et le bon grain.
Pierre SELLENET, La Garance Voyageuse n°52, hiver 2000.
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Agrostemma (semences) / Méteil (semences)

 

Elle est royale la nielle des blés !

            Qu’elle est belle la nielle des blés (Agrostemma githago L.) avec sa couronne (des mots grecs agro = « champ »  et stemma =« couronne ») formée par les 5 dents de son calice et aussi sa grosse graine toute noire et ornée de jolies protubérances ! Elle se voit comme le nez au milieu de la figure, qu’elle soit dans le champ de céréales, dans le silo de grains ou dans le lot de semences. Il lui colle à la peau comme une odeur sulfureuse, de malfaisante et de vénéneuse. Haro sur l’empoisonneuse ! Tout le monde vous le dira, même ceux qui ne l’ont jamais vu ! La nielle des blés est une Caryophyllacée contenant des glucosides (saponines) responsable d’une toxicité avérée. Mais on trouve des pourcentages étonnament variés dans la littérature quand aux doses où sa présence est toxique (de 1 à 2 % jusqu’à 50 % !). Il se pourrait qu’il y ait une différence importante selon les modalités-non précisées-des analyses faites jusqu’alors sur des farines crues ou sur les produits (pain par exemple) obtenus après fermentation et cuisson de cette farine. En effet, ces substances sont partiellement détruites par la chaleur. Il n’existe pas de maladie ni de nom populaire à proprement parler pour des intoxications avec la nielle des blés. Seul un nom scientifique, le githagisme, tente de cerner un phénomène qui n’a, semble-t-il pas beaucoup existé : a contrario de celles provoquées par l’ergot de seigle (mal des ardents, feu Saint-Antoine) dont les causes ont été longtemps inconnues mais les effets ravageurs bien décrits (voir les articles de La Garance voyageuse dans le n° 52 « Drogues et plantes magiques », hiver 2000). Le bétail est quelquefois sensible …surtout quand il n’y est pas accoutumé ! Il est fréquent de trouver sur les Causses des lots de céréales contenant des quantités très élevées de graines de nielle qui sont donnés aux troupeaux (brebis et moutons) sans tri préalable et sans dommage.

Ressources bibliographiques :
-La nielle des blés, tentative pour la réhabilitation d'une belle empoisonneuse.
Pierre SELLENET, La Garance Voyageuse n°76, hiver 2006



Nielle des blés (capsule pleine)


Graines de nielle recueillies dans un van


Couronne de la capsule de Nielle