L'histoire de l'eau de Cologne
Texte de Laëttia Claret,
La Garance voyageuse n° 61

La célèbre Eau de Cologne a connu plusieurs siècles de gloire pour parfumer et nettoyer les corps.
Son origine remonterait au XIVe siècle.


Une histoire légendaire raconte qu’en 1380, la Reine de Hongrie, âgée de 70 ans, reçut d’un moine ou d’un ange la recette d’une eau de senteurs miraculeuse aux vertus thérapeutiques à usage interne et externe (ce fut le premier parfum alcoolisé à base de romarin ; la recette de l’époque : sauge + marjolaine + romarin + eau de vie). Grâce à cette potion, la reine, infirme et goutteuse, recouvrit jeunesse et santé au point de se voir demandée en mariage par son voisin le roi de Pologne. Élaborées et inventées dans les couvents, les eaux miraculeuses se démultiplièrent et devinrent indispensables à la toilette quotidienne. On raconte qu’au XVIIe siècle, les religieuses du couvent de Santa Maria Novella à Florence préparaient depuis quatre siècles l’Aqua Regina, une eau admirable dont le commerce était florissant. Cette eau était un mélange de divers agrumes d’origine italienne dilués dans un alcool à haut degré. Au fil du temps, les sœurs en avaient perfectionné la formule jusqu’à lui faire connaître une réputation flatteuse à travers toute l’Europe.

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Vue de la ville de Cologne au XVIII


Produit de beauté remarquable, l’Aqua Regina embellissait, nettoyait la peau et parfumait discrètement. Médicament polyvalent, elle ranimait les hommes et même les animaux. Versée dans du vin ou du bouillon, elle était efficace contre l’apoplexie, les obstructions du foie, de la rate, les coliques, les bourdonnements d’oreilles, la goutte, les douleurs dentaires, la jaunisse, les migraines, les vapeurs, les accouchements difficiles… Elle assurait santé et longueur de vie. Cette renommée vint jusqu’aux oreilles d’un Gian Paolo Feminis, représentant de commerce. Il ne manqua pas de s’intéresser à la recette dont le secret était jalousement gardé par la supérieure du couvent.
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  Giovanni Maria Farina 1685-1766

Séduite par cet homme, la religieuse un peu naïve lui livra la formule (la recette de l’Aqua Mirabilis : esprit de vin + romarin + mélisse + bergamote + néroli + cédrat + citron). Aussitôt rentré chez lui à Cologne en 1690, il s’installa et s’empressa de fabriquer cette eau miraculeuse qu’il baptisa l’Aqua Mirabilis (« l’eau admirable »). Lorsqu’il mourut en 1763, il légua la recette à son petit neveu, Gian Maria Farina, premier d’une grande lignée de Farina qui s’est perpétuée jusqu’à nos jours. Ce dernier qui avait le sens des affaires, commercialisa cette eau rebaptisée Eau de Cologne.

À la fin du XVIIIe siècle, dans la ville de Cologne, les Français en guerre contre les armées rhénanes, se s’entichèrent de cette senteur et l’exportèrent en France. Elle fit bientôt la conquête de Napoléon 1er qui ne jura plus que par cette eau. Il en consommait une soixantaine de litres par mois. Il en parfumait sa personne, ses appartements, son cheval, se baignait dedans, la buvait… Il affirmait qu’elle stimulait sa matière grise et recommandait « le canard Farina » (un morceau de sucre trempé dans l’Eau de Cologne).



En 1806, un descendant Farina ouvrit une boutique à Paris au 331 rue Saint Honoré et créa pour l'empereur un flacon célèbre en forme de rouleau pour qu'il puisse le glisser dans ses bottes de cavalier. Napoléon 1er fut toute sa vie fidèle à l’Eau de Cologne, au point de se la faire fabriquer, au cours de son exil à Sainte Hélène,par son fidèle Mameluk Ali qui réussit à mettre au point ce produit avec des ingrédients qu’il se procura sur place. En 1862, Farina céda son affaire à ses cousins par alliance, Armand Roger et Charles Gallet. Depuis, de nombreux parfumeurs se sont inspirés de la recette originale pour compter parmi leur gamme de parfum cet « incontournable » Eau de Cologne.

Flacon en forme de rouleau


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